Chapitre 17 : Les Voix des Cendres

Le silence qui suivit l’Offrande fut plus lourd que la mort.

À l’endroit où Sélénéa avait disparu, seule demeurait une fine brume dorée qui ondulait doucement, comme une dernière respiration du monde ancien. Le Cœur de Velorn, lui, semblait s'être figé : les racines inversées brillaient d'une pâle lueur, et tout mouvement avait cessé.

Fyrael, figé au sommet de l'escalier, sentit une douleur sourde s’emparer de lui. Un vide. Une déchirure.
Comme si quelqu’un avait effacé Sélénéa du tissu même de l’existence.

— « Non… » murmura-t-il.

Il tenta de descendre, mais les marches de lumière s’effritaient sous ses pas, le repoussant. Velorn avait parlé. Son choix n’appartenait plus aux vivants.

Neryda réapparut à ses côtés, plus fantomatique que jamais.

— « Elle a choisi l’oubli pour nous offrir une dernière chance. Mais la faille ne se refermera pas si facilement. »

Dans le ciel au-dessus de Silvaronne, des fissures sombres lézardaient les nuages. D'étranges étoiles mortes, noires et froides, commençaient à apparaître, projetant des éclats d’un violet malsain.

Les Brumes, repoussées jusqu’ici par les pactes anciens, s'insinuaient de nouveau, plus denses, plus affamées.

— « Que devons-nous faire ? » demanda Fyrael, la gorge serrée.

Neryda leva un regard triste vers l’horizon.

— « Sur les ruines de l'ancien monde, un dernier serment doit être forgé. Non plus par la magie... mais par les cœurs des vivants. »

Elle lui tendit une lame étrange : une épée aux nervures cristallines, forgée dans les restes d'anciens serments brisés.

— « Rassemble les Éclats. Ceux qui se souviennent encore. Les derniers porteurs de mémoires. S'ils unissent leur serment, alors Velorn pourra renaître. Sinon... tout sera englouti. »

Fyrael prit l’épée. Elle vibrait contre sa peau, comme si elle reconnaissait sa peine et sa rage.

Il comprenait enfin :
Le sacrifice de Sélénéa n’était qu'une fondation.
La suite dépendrait de ceux qui accepteraient de se souvenir malgré la douleur.

Pendant ce temps, loin sous la surface de Velorn, au plus profond des cavernes oubliées, une silhouette s’éveillait.

Une femme sans nom.
Sans passé.
Sans avenir.

Mais au fond de son regard d’argent, une étincelle persistait :
Un écho.
Une résonance.
Un fragment du Serment perdu.

Elle ne savait pas qui elle était.
Mais elle savait qu’elle devait avancer.

Les Brumes s’ouvraient devant elle, formant un sentier sinueux vers un monde qui l'avait oubliée… mais qu’elle n’avait pas encore renoncé à aimer.